L’INCINERATEUR DE CADAVRES

SAMEDI 13 JUIN - 20H

long métrage

Juraj Herz / Rép. Tchèque / 1968 / 1h40
À la veille de la Seconde Guerre mondiale, Karl Kopfrkingl, incinérateur de cadavres, est un employé modèle qui exerce son métier avec amour. Persuadé d’avoir du sang germanique dans les veines et alors que l’Allemagne s’apprête à envahir la Tchécoslovaquie, ce dernier se prend à rêver d’une race pure... Son crématoire va pouvoir tourner à plein régime.

Soirée proposée par Un Autre Écran.

« M.Kopfrkingl aime beaucoup ses morts : il défroisse les cols en dentelle des rentières décédées, resserre les noeuds de cravate des fonctionnaires pétrifiés par leur dernière crise cardiaque non sans leur accorder l’ultime coquetterie d’un coup de peigne. Puis, il les enfourne au son d’une musique propre à les conduire dans l’éther d’une autre existence, débarrassée des miasmes et des douleurs de leur vie terrestre tout juste achevée. M. Kopfrkingl est l’incinérateur en chef du Crematorium de Prague…
Ce n’est pas une fonction anodine que d’être l’ordonnateur des pompes funèbres de la capitale tchèque en 1938. Un ami de M. Kopfrkingl le persuade qu’il doit considérer avec lucidité la situation politique de son pays : les nazis sont au pouvoir en Allemagne et ils seront bientôt les maîtres en Tchécoslovaquie. Il faut dès à présent choisir son camp, et effacer les souillures éventuelles d’une vie sociale trop bien rangée. M. Kopfrkingl est sans doute appelé à un grand destin. Mais il se trouve que sa femme est juive…

L’Incinérateur de cadavres est une merveille d’humour noir, qui distille un sentiment de délicieux malaise. La caméra de Juraj Herz est d’une virtuosité sans égale : elle fouille les visages et les détails de physionomie, créant des effets quasi hypnotiques ; elle compose des images étranges, au noir et blanc somptueux, encore rehaussées par le leit-motiv à la fois lyrique et ironique d’une musique sublime. Le film de Juraj Herz est beaucoup plus qu’un simple exercice de virtuosité. Tourné pendant le Printemps de Prague en 1968, il suggère la violence insidieuse des totalitarismes de toutes les époques. Les communistes tchèques orthodoxes, dont les troupes du Pacte de Varsovie rétablirent le pouvoir à l’été 1968, ne s’y trompèrent pas et interdirent la sortie du film : on ne put le voir en salle que vingt ans après sa réalisation.

C’est ce film exceptionnel que l’association Un Autre Ecran vous invite à découvrir à l’hybride le samedi 13 juin 2009 à 20h. A deux pas de la gare Saint-Sauveur vouée provisoirement à célébrer les fastes de Lille 3000, c’est une occasion unique d’entrer dans l’univers surréaliste du pays de Kafka et d’aiguiser sa réflexion morale et politique. »

Olivier Denhez, association Un Autre Ecran