SAMEDI 16 JANVIER - 20H30
long métrage
Pier Paolo Pasolini / Italie / 1975 / 1h55
Durant la République fasciste de Salo,
quatre seigneurs élaborent un règlement
pervers auquel ils vont se conformer. Ils
sélectionnent huit représentants des deux
sexes qui deviendront les victimes de
leurs pratiques les plus dégradantes. Tous
s’enferment alors dans une villa près de
Marzabotto afin d’y passer 120 jours en respectant
les règles de leur code terrifiant.
Séance suivie d’un débat.
En partenariat avec l’association
Un Autre Écran.
L’association a pour but de regarder la société à
travers le prisme de la culture homosexuelle, ou
du regard sur cette culture, telle qu’elle s’exprime
au cinéma. Un Autre Écran projette des films et
apporte sur eux un éclairage qu’il veut savant,
ouvert et convivial.
http://unautreecran.free.fr
Salo ou les 120 Journées de Sodome
par Olivier Denhez, association Un Autre Ecran
L’association Un Autre Ecran vous présente ses meilleurs voeux cinématographiques pour 2010. Elle voue convie à un rendez-vous qui fera date le samedi 16 janvier 2010 à 20h30 à L’hybride. C’est en effet l’ultime et terrible film de Pasolini, Salo, qui vous sera présenté. Le film dont on parle tant mais qu’on a rarement vu. Qu’on a rarement l’occasion de voir en tout cas, tant sa violence et son pessimisme continuent, trente-cinq ans après sa sortie, à mettre mal à l’aise et inhiber les programmateurs de salles de cinéma et de télévision (le film n’a jamais été projeté en France sur les chaînes de télévision publiques). Venez donc en juger par vous-mêmes !
Pasolini, travaillant à une adaptation du fameux roman de Sade écrit en 1785 à la Bastille et jamais publié de son vivant, eut l’idée d’une transposition contemporaine d’un récit qui narrait avec force détails les supplices sexuels infligés par des seigneurs libertins aux jeunes gens qu’ils avaient fait enlever afin de les soumettre à leurs caprices. Le cinéaste imagina de faire de l’oeuvre de Sade la métaphore d’un pouvoir absolu sur lequel ne pèserait aucune contrainte d’ordre moral : la République fasciste de Salo fondée en septembre 1943 par Mussolini fournissait un cadre historique idéal à l’expression d’un pouvoir de ce type, qui pourrait pratiquer en toute impunité les pires exactions. “Tout le raisonnement de Sade a une fonction bien spécifique : représenter ce que le pouvoir peut faire du corps humain. La réduction du corps à l’état de chose, l’annulation de la personnalité de l’autre. C’est un film sur le pouvoir mais aussi sur l’anarchie du pouvoir”, expliquait le cinéaste. Les quatre aristocrates du roman de Sade sont ici remplacés par quatre dignitaires fascistes qui rassemblent leurs victimes dans un palais isolé et solidement gardé. S’y dérouleront les atrocités voulues par les maîtres des lieux, selon un programme élaboré dès le départ et où on a pris garde de préciser que tout ce qui est excessif est souhaitable. Pasolini emprunte à L’Enfer de Dante une suite de Cercles que parcourront les victimes et qui les mènera, au terme d’épreuves douloureuses et d’humiliations, à la mort.
La sexualité est partout dans Salo. Non pas la sexualité solaire, rayonnante de la Trilogie de la Vie (Le Décaméron, Les Contes de Canterbury, Les Mille et une nuits) réalisée peu de temps auparavant, mais une sexualité noire, mutilante, morbide. Le corps des jeunes victimes n’est plus qu’un objet de consommation, qu’on finira par détruire après qu’on en eut épuisé toutes les possibilités de jouissance. Certains plans du film sont insupportables mais Pasolini réussit, par une esthétique étudiée et des procédés rhétoriques qui alternent tension et relâchement, à créer une distance qui permet au spectateur d’aller jusqu’au bout de cette expérience cinématographique à nulle autre pareille, dont on ressort profondément bouleversé.
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